L’angoisse maternelle : quand le silence menaçait de tout anéantir

Publié le 30 septembre 2025

Récemment installée chez sa belle-famille après avoir donné naissance, ma fille traversait une période postnatale marquée par la solitude et le désarroi. Chaque appel téléphonique révélait sa voix tremblante d'épuisement : "Maman, cette peur m'envahit... Je t'en supplie, viens me sauver de cette situation."

Ces appels incessants me harcelaient sans répit, de jour comme de nuit. Mon époux essayait de m’apaiser en me disant : « C’est normal, elle découvre la maternité. Elle a besoin de temps pour s’adapter. » Je restais figée, le téléphone serré contre mon oreille, submergée par une inquiétude profonde.

Mais cette nuit-là, un déclic s’est produit en moi. Au petit matin, j’ai réveillé mon mari en lui annonçant avec une assurance retrouvée : « Je vais la rejoindre. Sans attendre. »

Une scène bouleversante dans la demeure familiale

Après une trentaine de kilomètres parcourus, nous nous sommes immobilisés devant la maison. En découvrant la cour, mes jambes ont failli céder.

Deux cercueils.

Le premier, massif, était enseveli sous les fleurs. Le second, minuscule.

Ma fille. Et ma petite-fille nouveau-née.

Ma respiration s’est coupée, mes larmes s’étaient taries. Elles reposaient là, silencieuses, captives de cette image insoutenable.

Une tragédie qui aurait pu être empêchée

Les voisins, leurs murmures… peu à peu, la vérité m’est apparue. Élise avait supplié qu’on la conduise à l’hôpital. Elle présentait des saignements importants. Mais les traditions familiales l’avaient enfermée : « Le Sutak interdit toute sortie du foyer pendant les onze jours suivant l’accouchement », avait déclaré sa belle-famille.

On lui avait donné des remèdes à base de plantes plutôt que de consulter un médecin. Quand son état s’est soudainement aggravé, il était déjà trop tard pour intervenir.

Elle nous a quittés dans la pénombre de la nuit. Son bébé l’a accompagnée.

La colère comme moteur de survie

Quand j’ai mesuré l’ampleur de cette négligence, j’ai tout arrêté. J’ai interrompu la cérémonie funéraire. J’ai alerté les secours, contacté les services d’aide aux femmes, et exigé l’ouverture d’une enquête.

Les autorités sont intervenues. Les rites traditionnels ont été reportés. Les corps ont été transférés à la morgue pour autopsie.

Ma voix tremblait, mais ma résolution restait inébranlable. Pour Élise. Pour son enfant.

Les démarches judiciaires

Le rapport initial mentionnait une hémorragie du post-partum. Une complication obstétricale connue, normalement maîtrisable avec des soins appropriés. Mais dans son cas, elle avait été négligée, étouffée par une interprétation rigide de coutumes ancestrales.

La sage-femme traditionnelle a été interrogée. Le mari, la belle-mère, ont dû s’expliquer sur les faits. Les autorités ont engagé des poursuites pour négligence ayant entraîné la mort.

Pour ma part, je me tenais droite, le dossier médical en main, résolue à faire éclater la vérité au grand jour.

Changer la douleur en action

Quand les cercueils sont revenus chez nous, les voisins sont venus en silence, effleurant les cercueils comme pour demander pardon. J’ai placé la photo de Élise dans le salon, une bougie vacillant à ses côtés. Et j’ai promis que son histoire ne tomberait pas dans l’oubli.

Dès le lendemain, j’ai lancé une initiative communautaire avec le groupe de femmes locales : coller des affiches, diffuser des numéros d’urgence, sensibiliser les familles pour rappeler une évidence fondamentale : une jeune mère en détresse mérite une attention immédiate.

Car aucune tradition, aussi respectable soit-elle, ne devrait conduire au destin tragique d’une mère et de son nouveau-né.